Le rapport de 98 pages, intitulé « “Vivre un cauchemar” – Face à une crise qui s’aggrave, la situation en Haïti nécessite une réponse urgente fondée sur les droits humains », documente les abus commis par des groupes criminels et l’inaction de l’État dans quatre communes de la métropole de Port-au-Prince – Cabaret, Cité Soleil, Croix-des-Bouquets, et Port-au-Prince même – entre janvier et avril 2023. En Haïti, l’État est quasiment absent, l’impunité règne et près de la moitié de la population est en situation d’insécurité alimentaire grave. Human Rights Watch a par ailleurs analysé les crises humanitaires, politiques et judiciaires qui touchent le pays, ainsi que les abus des interventions internationales passées et l’héritage sur le long terme de l’esclavage, de l’exploitation et des abus des puissances coloniales.
Recommandations (Extrait)
Au Conseil de sécurité des Nations Unies
- Toute autorisation de déploiement consensuel d’une force internationale, à la demande des autorités haïtiennes et du Secrétaire général des Nations Unies, devrait être essentiellement composée de policiers et soutenir les efforts de la Police nationale haïtienne pour rétablir des conditions de sécurité adéquates. Cette force devrait avoir pour mandat de patrouiller et de sécuriser l’accès aux routes principales du pays afin d’assurer le transport de la nourriture et de l’aide humanitaire et de permettre aux habitants de circuler librement ; de sécuriser les sites clés tels que les ports, les aéroports, les tribunaux et les hôpitaux afin de permettre la fourniture de services à la population ; et d’apporter un soutien technique, logistique et de renseignement aux autorités haïtiennes qui cherchent à enquêter, à arrêter et à poursuivre les chefs des groupes criminels qui commettent des abus ainsi que ceux qui soutiennent ces groupes, dans le cadre de procédures respectueuses des droits, notamment en créant des conditions permettant aux membres de ces groupes de rendre leurs armes en toute sécurité.
Au Secrétaire général des Nations Unies
- Veiller à ce que les activités du BINUH appuient la mise en place d’un gouvernement de transition, notamment en fournissant des ressources techniques et financières et en renforçant les interactions avec les représentants de la société civile et les acteurs politiques haïtiens (y compris l’opposition) et en tenant compte de leurs propositions.
- Veiller à ce que le HCDH, le BINUH et d’autres agences des Nations Unies soutiennent la mise en œuvre d’un mécanisme de contrôle de la Police nationale haïtienne, sous l’autorité des autorités de transition, dans le but d’identifier, d’enquêter et, le cas échéant, de poursuivre les policiers qui ont participé à des violations des droits humains, à des actes de corruption, au soutien de groupes criminels ou à d’autres délits.
À tous les gouvernements, institutions et donateurs concernés
- Cesser de soutenir les acteurs politiques en Haïti qui sont impliqués de manière crédible dans le soutien aux groupes criminels.
- Soutenir, notamment par des ressources techniques et financières, la facilitation de la mise en place d’un gouvernement de transition pour rétablir des conditions de sécurité adéquates et garantir l’adhésion aux droits humains fondamentaux, rétablir un état de droit respectueux des droits et permettre à tous les Haïtiens d’accéder aux produits de première nécessité, jusqu’à la formation d’un gouvernement en bonne et due forme sur la base d’élections démocratiques.
Aux États-Unis, au Canada et à l’Union européenne
- Imposer, faire respecter pleinement, mettre à jour de manière régulière et adopter des sanctions ciblées supplémentaires, notamment des interdictions de voyager et des gels d’avoirs, à l’encontre des responsables de meurtres, d’enlèvements, de violences sexuelles et d’autres abus graves, et des acteurs haïtiens et étrangers responsables du soutien apporté aux groupes criminels qui commettent des abus, si nécessaire, afin de garantir qu’elles soient adaptées à l’évolution de la situation en Haïti.
- Adopter des mesures plus strictes pour mettre fin au flux et à la vente illicites d’armes et de munitions aux groupes criminels violents opérant en Haïti.
Aux États-Unis et à la France
- Reconnaître explicitement, avec des garanties concernant la non-répétition de tels actes, la responsabilité des États-Unis et de la France pour les préjudices et abus historiques qu’ils ont commis et qui continuent d’avoir des répercussions, et œuvrer à l’élaboration d’un processus de réparation efficace et sincère, mené par le peuple haïtien.
Aux membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM)
- Continuer à soutenir les négociations politiques entre les représentants de la société civile haïtienne, les acteurs politiques et les responsables gouvernementaux en vue de la mise en place d’un gouvernement de transition qui devrait s’efforcer de rétablir des conditions de sécurité adéquates et de garantir l’adhésion aux droits humains fondamentaux, de rétablir un état de droit respectueux des droits et de permettre à tous les Haïtien-ne-s d’avoir accès aux produits de première nécessité.
- Adopter des mesures pour mettre fin aux flux et à la vente illicites d’armes et de munitions aux groupes criminels violents opérant en Haïti, notamment en renforçant le contrôle des ports et du trafic maritime.
À l’administration du Premier ministre Ariel Henry
- Collaborer de manière significative et de toute urgence avec un groupe diversifié d’acteurs sociaux et politiques haïtiens pour élaborer une solution à la crise multidimensionnelle du pays, avec des objectifs clairs et un calendrier précis.
- Soutenir un processus qui permettra la formation d’un gouvernement de transition, le rétablissement de conditions de sécurité adéquates et l’adhésion aux droits humains fondamentaux, le rétablissement d’un état de droit respectueux des droits, un accès sûr et équitable aux produits de première nécessité pour tous les Haïtien-ne-s, et la tenue d’élections démocratiques pour mettre en place un gouvernement en bonne et due forme.