L’envoyée de l’ONU en Haïti, Maria Isabel Salvador, a insisté jeudi, devant le Conseil de sécurité, sur la gravité de la situation dans ce pays, où de multiples crises prolongées ont atteint un point critique.
“Haïti reste en proie à une violence croissante en raison d’une augmentation sans précédent des enlèvements, des viols et d’autres crimes commis par des gangs armés qui affectent de plus en plus les moyens de subsistance de la population et sapent les activités humanitaires. Je ne saurais trop insister sur la gravité de la situation en Haïti », a dit Mme Salvador dans un exposé devant les membres du Conseil.
L’année dernière, le Bureau des Nations Unies en Haïti (BINUH), qu’elle dirige, a recensé plus de 8.400 victimes directes de la violence des gangs, y compris des personnes tuées, blessées et kidnappées, soit une augmentation de 122% par rapport à 2022.
Une violence qui s’étendLa capitale Port-au-Prince a été à l’origine de 83% des morts et des blessés, et la violence s’est également étendue à d’autres régions, notamment à l’Artibonite. Au sud de la capitale, des gangs ont mené des attaques à grande échelle pour contrôler des zones clés et continuent de recourir systématiquement à la violence sexuelle dans les zones qu’ils contrôlent, mettant ainsi en danger les femmes et les filles âgées d’à peine 12 ans.
Depuis le dernier exposé de Mme Salvador devant le Conseil de sécurité en octobre, au moins 75 personnes auraient été tuées par des mouvements d’autodéfense civile apparus comme un moyen d’auto-défense contre les gangs. La violence, les déplacements et la perte des moyens de subsistance ont rendu des milliers d’enfants vulnérables au recrutement par les gangs.
Elle a noté que bien que le dialogue et les consultations inter-haïtiens se poursuivent, certaines divergences subsistent sur les modalités de gouvernance, entravant les progrès sur le front politique.
Elle a regretté que depuis son dernier exposé devant le Conseil, « de nouveaux acteurs violents ont pris de l’importance » et elle s’est inquiété « de leur rôle potentiellement déstabilisateur, susceptible d’éroder davantage les institutions haïtiennes et de diviser la population haïtienne ». Elle a appelé « les parties prenantes de tous bords à s’engager de manière pacifique et constructive dans le processus politique ».
L’envoyée de l’ONU a jugé essentiel le régime de sanctions pour lutter contre l’impunité et perturber les ressources financières et les flux opérationnels associés aux gangs criminels. Elle s’est dit encouragée par les efforts déployés par les autorités haïtiennes pour améliorer le système judiciaire et lutter contre la corruption.