En 2022, les États-Unis d’Amérique avaient demandé au Canada de prendre le Leadership du dossier Haïti et surtout de superviser la mission multinationale non onusienne qui devait permettre au gouvernement de Ariel Henry de faire face à l’insécurité et avoir ainsi le climat pour les élections.
Mais le Canada avait refusé de diriger une telle mission et d’envoyer ses troupes en Haïti. Cependant, le PM Justin Trudeau et la ministre des Affaires Étrangères Mélanie Joly ont déployé une autre forme de leadership :
1) donner des sanctions à des membres de l’élite économique et politique d’Haïti (des sanctions dénoncées comme étant arbitraires par les personnes visées) ;
2) promettre des subventions au renforcement de la police nationale, pour combattre le choléra et accompagner les victimes de violence basée sur le genre ;
3) faciliter la livraison des blindés que l’Etat Haïtien avait commandé avec son argent ;
4) Superviser la mer avec 2 navires et faire survoler le pays par un avion ;
5) Trouver un pays qui devait prendre le leadership de la mission à sa place (Kenya) ;
6) Influencer les pays de la Caricom et la République Dominicaine dans le dossier Haïti.
Une mission ardue pour le Canada qui entre-temps avait perdu la vedette, les États-Unis ayant décidé de changer le jeu diplomatique et de reprendre “ses droits” sur Haïti. L’année électorale s’affirmait de plus en plus difficile avec Donald Trump en face du Président Biden.
Le dossier Haïti est sensible sur le plan international et nuit à l’image des américains d’autant que jusqu’à date l’assassinat du président Jovenel Moïse reste une affaire non résolue.
On peut donc mieux comprendre le discours de Anthony Blinken le 11 Mars 2024 à Jamaïque et la présence de Justin Trudeau via vidéoconférence à cette Assemblée à la Jamaïque.
Extrait du Discours du Secrétaire d’Etat des États-Unis d’Amérique
“C’est ce qui nous réunit aujourd’hui : une crise politique, une escalade de la violence, des troubles. Tout cela a créé une situation intenable pour le peuple haïtien. Et nous savons tous qu’une action urgente est nécessaire, tant sur le plan politique que sur celui de la sécurité, pour aider à faire avancer les choses dans une meilleure direction, pour aider à faire ce qu’il faut pour le peuple haïtien.
Nous sommes ici à Kingston aujourd’hui pour écouter – pour écouter vos idées, mais aussi pour apporter notre soutien concret à la voie à suivre, et en particulier à la proposition conjointe qui a été élaborée par la CARICOM et toutes les parties prenantes haïtiennes pour accélérer la transition politique.
Nous soutenons le plan visant à créer un collège présidentiel indépendant, inclusif et à large assise qui, en particulier :
- Premièrement, prendrait des mesures concrètes pour répondre aux besoins immédiats du peuple haïtien ;
- Deuxièmement, permettrait le déploiement rapide de la Mission multinationale de soutien à la sécurité ;
- et Troisièmement, grâce à ce déploiement et au renforcement de la police nationale haïtienne, créerait les conditions de sécurité nécessaires à la tenue d’élections libres et équitables, à l’acheminement de l’aide humanitaire aux personnes qui en ont besoin et à la remise d’Haïti sur la voie des opportunités économiques et de la croissance.”
Le Secrétaire d’état a annoncé que le ministère de la défense des États-Unis double son soutien approuvé à la mission, qui passe de 100 à 200 millions de dollars, ce qui porte le soutien total des États-Unis à 300 millions de dollars pour cet effort. “J’annonce également une aide humanitaire supplémentaire pour le peuple haïtien : 33 millions de dollars pour renforcer la santé et la sécurité alimentaire.” (Les Etats-Unis avaient déjà promis 200 millions de dollars pour la mission multinationale d’appui à la sécurité).
De son côté, le Cabinet du PM Trudeau a informé que le PM Canadien en préparation à ce sommet sur Haïti à la Jamaïque avait échangé avec plusieurs officiels de la Caricom pour renforcer les liens du Canada avec ces pays et avancer dans leurs priorités communes. Par exemple :
Le 7 Mars 2023 : “ Le premier ministre Trudeau et la première ministre Mottley ont confirmé les liens étroits qui unissent le Canada et la Barbade. Le premier ministre Trudeau a salué l’engagement de la Barbade à fournir du personnel de sécurité à la Mission. “
Le 10 Mars : “Le premier ministre Trudeau et la première ministre Mottley ont souligné qu’il était essentiel de parvenir à un consensus politique inclusif et ont convenu de rester en contact à mesure qu’évolue la situation en Haïti.”
Le 10 Mars : “Le PM Trudeau a discuté avec le PM de la Jamaïque, Andrew Holness, de la détérioration des conditions de sécurité en Haïti et de leur volonté de travailler avec des partenaires pour rétablir la paix et la sécurité dans le pays. Le premier ministre Trudeau et le premier ministre Holness se sont dits impatients de faire avancer leurs priorités communes.”
Le 11 Mars : le premier ministre Justin Trudeau a convoqué le Groupe d’intervention en cas d’incident pour discuter de la situation en cours en Haïti avec des ministres et de hauts responsables. Il a réaffirmé qu’il fallait déployer de toute urgence la Mission multinationale d’appui à la sécurité autorisée par les Nations Unies afin d’améliorer les conditions de sécurité pour les civils. Il a souligné l’engagement du Canada à contribuer à hauteur de 80,5 millions de dollars à la Mission ainsi que les efforts visant à aider les membres de la CARICOM à se préparer à y participer. Le premier ministre a souligné qu’il était essentiel que d’autres partenaires internationaux apportent leur soutien à la Mission.
Le 11 Mars : “Le premier ministre Justin Trudeau s’est entretenu avec le premier ministre d’Haïti, Ariel Henry, au sujet de la situation en Haïti. Le premier ministre Trudeau a exprimé la volonté constante du Canada de travailler en étroite collaboration avec Haïti et d’autres partenaires régionaux et internationaux, notamment la Communauté des Caraïbes (CARICOM), pour favoriser la stabilité et le développement durable d’Haïti.
Le premier ministre Trudeau et le premier ministre Henry ont réaffirmé les liens étroits qui unissent le Canada et Haïti.
Le même 11 Mars, après le consensus autour de la création d’un Conseil présidentiel de transition, la Caricom informe l’intention de démissionner de Ariel Henry.
« Nous prenons acte de sa démission lors de la mise en place d’un conseil présidentiel de transition et de la nomination d’un Premier ministre par intérim », a déclaré le président de la Communauté des Caraïbes, Irfaan Ali, également président du Guyana, en remerciant Henry pour son service à Haïti.
Ironie du sort, celui-là même qui a demandé le déploiement de la mission multinationale en Haïti a été obligé de se retirer avant même la venue de la mission. Les gangs armés ont estimé que Ariel Henry n’avait pas l’étoffe pour garantir la vie des citoyens haïtiens et faisait partie du problème. Il devait démissionner sinon on entendra parler de génocide en Haïti a déclaré Jimmy Cherizier “Barbecue” représentant des chefs de gangs de G9 familles et alliés et Viv Ansanm.
Pour conclure avec sa présentation Blinken a déclaré “Nous savons tous que seul le peuple haïtien peut, seul le peuple haïtien doit déterminer son propre avenir, et personne d’autre. Mais nous tous ici – la CARICOM, les États-Unis, nos autres partenaires – nous pouvons aider. Nous pouvons aider à restaurer une base de sécurité qui puisse répondre à l’énorme souffrance que connaissent les Haïtiens innocents, et aider à créer les conditions qui leur permettront d’avoir cette opportunité.”
La rédaction