Le 18 mars 2024, le Conseil de sécurité de Nations Unies s’est réuni à huis clos sur Haïti. L’Équateur et les États-Unis, les leaders du dossier, ont sollicité la réunion. La Représentante spéciale et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), María Isabel Salvador, et un représentant de la CARICOM étaient attendus pour faire un exposé.
Le Quotidien 509 se propose ici de partager avec ses lecteurs un extrait des minutes de la réunion du Conseil de sécurité. Un conseil qui reste préoccupé quant au déploiement de la mission dirigée par le Kenya, la mise en oeuvre du Conseil présidentiel transitoire et la situation actuelle du Port-au-Prince, controlée actuellement par les gangs armés.
La CARICOM a annoncé l’accord du 11 mars à l’issue de plusieurs jours de pourparlers avec des acteurs politiques haïtiens et d’une réunion d’urgence en Jamaïque à laquelle ont participé des membres de l’organisation intergouvernementale ainsi que du Brésil, du Canada, de la France, du Mexique, des États-Unis et de l’ONU. L’accord final serait un compromis tiré des nombreuses propositions de gouvernance transitoire que les groupes haïtiens avaient soumises à la CARICOM.
À l’heure où nous écrivons ces lignes (le conseil qui écrit), alors que la violence des gangs à Port-au-Prince semble à nouveau augmenter, on ne sait toujours pas comment le siège réservé au Platfòm Pitit Desalin au Conseil présidentiel de transition sera reconstitué.
Notamment, l’accord du 11 mars interdit de participer au conseil présidentiel à toute personne qui a été inculpée ou accusée d’un crime, qui est désignée en vertu du régime de sanctions 2653 du Conseil de sécurité contre Haïti ou qui s’oppose à la mission MSS.
Un autre groupe connu sous le nom de Platfòm Pitit Desalin, dirigé par l’ancien sénateur Jean-Charles Moïse, a refusé d’y participer, insistant plutôt sur l’installation d’un conseil présidentiel alternatif de trois personnes qui comprendrait l’ancien chef rebelle Guy Philippe, qui a dirigé le coup d’État de 2004 qui a renversé le président démocratiquement élu Jean-Bertrand Aristide et a été rapatrié en Haïti en novembre 2023 après avoir purgé six ans dans une prison fédérale américaine pour des accusations de drogue.
Depuis son retour, Philippe, qui est un allié de Moïse et considéré comme proche des gangs, a rallié le soutien de l’opinion publique et appelé à la démission d’Henry, mais il a rejeté tout plan négocié par la communauté internationale, faisant écho à une position également exprimée par Chérizier.
Après l’annonce de l’accord du 11 mars, les responsables kenyans ont déclaré que le déploiement serait suspendu jusqu’à ce qu’un nouveau Premier ministre par intérim soit nommé, bien que le président kényan William Ruto ait par la suite réaffirmé l’engagement du pays envers la mission. En plus de la situation politique d’Haïti, un autre obstacle au déploiement de la mission MSS est le manque de ressources. Les États-Unis sont le principal bailleur de fonds de la mission, ayant précédemment promis un soutien de 200 millions de dollars, mais le déblocage de ces fonds a été retardé par le Congrès américain.
Le 6 mars, le Conseil de sécurité s’est réuni à huis clos pour discuter de l’escalade de la violence entre gangs.
La récente flambée de violence représente une nouvelle détérioration de la situation en Haïti, qui est en proie à une crise multidimensionnelle caractérisée par une impasse politique, une violence extrême et des conditions humanitaires désastreuses depuis l’assassinat de l’ancien président Jovenel Moïse en juillet 2021.
Le pays ne dispose actuellement pas d’un seul responsable démocratiquement élu, le gouvernement intérimaire dirigé par Henry n’ayant pas été en mesure de parvenir à un accord politique avec les groupes d’opposition sur l’organisation des élections.
Au milieu de l’impasse, des gangs criminels politiquement connectés ont pris le contrôle d’environ 80 % de Port-au-Prince, alimentant des niveaux de violence sans précédent.
Selon le dernier rapport du Secrétaire Général sur le BINUH, publié le 15 janvier et qui couvre l’évolution de la situation depuis le 16 octobre 2023, le nombre d’homicides signalés en 2023 a atteint près de 5 000, soit une augmentation de 120 % par rapport à 2022.
Le Conseil de sécurité doit examiner le prochain rapport du Secrétaire général sur le BINUH en avril.