Depuis son départ de Port-au-Prince le 9 mars 2025, le Ministre des Affaires Étrangères et des Cultes, S.E.M. Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste, a entamé une tournée diplomatique aux États-Unis, un périple marqué par des rencontres avec les chefs de missions consulaires haïtiennes et des discussions stratégiques au sein de l’Organisation des États Américains (OEA).
Officiellement, cette mission vise à renforcer l’encadrement communautaire des Haïtiens vivant aux États-Unis et à optimiser les services consulaires. Mais derrière cette série de visites protocolaires, plusieurs interrogations demeurent : quels sont les véritables enjeux de cette tournée et quelles opportunités concrètes en découlent pour Haïti ? Harvel n’a rencontré aux Etats-Unis aucune personnalité influente de l’Administration de Trump.
Étape 1 : Washington (12 mars 2025), entre diplomatie multilatérale et désistements
La première escale du Chancelier a eu lieu à Washington, où il a pris part activement à la 56ᵉ session spéciale de l’Assemblée générale de l’OEA. Parmi les sujets abordés figuraient la lutte contre l’insécurité en Haïti, le renforcement des forces de l’ordre et la préparation des prochaines élections générales. Cependant, notre rédaction a appris qu’un rendez-vous stratégique avec son homologue dominicain, Roberto Alvarez, a été annulé sans explication officielle, alors que la crise migratoire haïtiano-dominicaine reste une problématique urgente que le gouvernement peine à adresser efficacement.
Étape 2 : New York (12 mars 2025), Boston (13 mars 2025), Chicago (14 mars 2025) – Des visites consulaires sous tension
À New York, puis à Boston, le Chancelier a multiplié les réunions avec les équipes consulaires afin d’évaluer la qualité des services de documentation et les mécanismes de protection des Haïtiens vivant dans ces juridictions. Cependant, notre rédaction a appris que la visite de Chicago a été marquée par un moment de tension. Excédé par un différend interne, Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste se serait emporté contre un membre du personnel et aurait frappé la table.
À Chicago (14 mars 2025) et Atlanta (15 mars 2025), la priorité affichée était l’amélioration des services consulaires et l’encadrement des communautés haïtiennes dispersées à travers plusieurs États américains. Pourtant, les préoccupations des Haïtiens sur place vont bien au-delà des formalités administratives. Beaucoup s’inquiètent du manque d’initiatives concrètes pour répondre aux potentielles vagues de déportations en provenance des États-Unis et de la République Dominicaine.
Étape 3 : Miami (18 mars 2025) et Orlando (17 mars 2025) – Un discours de fermeté sur fond d’incertitudes
La tournée s’est poursuivie en Floride, avec des arrêts à Miami et Orlando. Dans ces deux grandes villes où réside une importante communauté haïtienne, le Chancelier a tenu un discours de fermeté, affirmant l’engagement du gouvernement à protéger ses ressortissants et à moderniser les services consulaires. Mais au-delà des déclarations officielles, peu de précisions ont été apportées sur les moyens concrets mis en œuvre pour faire face aux urgences migratoires et à l’isolement croissant des Haïtiens à l’étranger.
Une diplomatie en fuite face aux crises majeures ?
Si cette tournée a mis en avant une volonté affichée d’améliorer la qualité des services consulaires, elle laisse néanmoins planer des doutes sur les priorités réelles du gouvernement haïtien. Pendant que Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste multiplie les visites et les discours rassurants, les grandes crises restent en suspens : la gestion des relations avec la République Dominicaine, les expulsions massives d’Haïtiens, ou encore la fermeture prolongée de l’Aéroport International Toussaint Louverture.
Par ailleurs, plusieurs observateurs commencent à questionner l’efficacité du Chancelier à la tête du Ministère. Bien qu’il soit reconnu comme un diplomate de carrière, certains de ses choix suscitent la controverse, notamment la révocation d’anciens cadres en dehors des procédures habituelles du ministère. Son approche semble plus axée sur l’accumulation de perdiems que sur une réelle avancée diplomatique pour Haïti. Même sa visite au Bénin, reconnu comme un centre mystique mondial, et son dépôt de gerbe de fleurs au Vatican au pied de Notre-Dame du Perpétuel Secours, n’ont pas suffi à apporter des solutions concrètes à la crise haïtienne.
Le Chancelier a-t-il réellement capitalisé sur cette tournée pour défendre les intérêts d’Haïti sur la scène internationale, ou s’agit-il d’une simple opération de communication, alors que l’action diplomatique peine à proposer des réponses tangibles aux urgences du moment.
La rédaction