DÉCLARATION DU GROUPE DE PERSONNALITÉS ÉMINENTES – Suite à la visite en Haïti, 11-16 août 2024
En réponse à l’invitation du Président du Conseil présidentiel de transition (TPC) et aux appels des parties prenantes, le Groupe de personnalités éminentes (GEP) de la CARICOM a effectué une visite en personne en Haïti du 11 au 16 août 2024 dans le cadre du suivi des précédentes réunions virtuelles avec le Conseil présidentiel, le Premier ministre et les dirigeants du secteur en nomination. Le Groupe de travail a estimé qu’il était nécessaire de constater et d’évaluer les progrès accomplis dans le processus de transition pour être en mesure de faire rapport aux chefs de gouvernement de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).
La visite a permis un échange de vues et un dialogue avec des représentants d’un large éventail de la société haïtienne – l’exécutif bicéphale ; le Directeur général de la Police nationale d’Haïti ; la ministre chargée de la condition féminine, les responsables sectoriels qui procèdent à la nomination ; la direction de partis politiques qui ne sont pas représentés au CPT ni au gouvernement ; le secteur de la société civile, y compris les associations de femmes et de défense des droits humains ; les secteurs religieux et privé ; Syndicats; et un groupe de la diaspora en visite. Le GEP a également rencontré des représentants des principaux partenaires internationaux d’Haïti (Canada, France, États-Unis) ainsi que des représentants du Bureau des Nations Unies en Haïti (BINUH), de l’Organisation des États américains (OEA) et du commandant de la Force de la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MSSM).
La visite au CPP et au premier ministre a permis de faire le point sur la situation générale, leurs activités et leurs plans, ainsi que leurs préoccupations. Le GEP a été encouragé par le fait que le CPT semblait faire des efforts pour surmonter les retards dans la mise en place d’un certain nombre d’institutions et d’entités clés requises en vertu de l’Accord du 3 avril entre les parties prenantes, telles que le Conseil électoral provisoire (CEP), l’Organe de surveillance de l’action gouvernementale (OCAG), le Conseil de sécurité nationale et la Conférence nationale. La question de l’éloignement entre certains secteurs et leurs représentants au Conseil et des frictions qui en résultent a été soulevée. Le GEP a également discuté du malaise parmi les parties prenantes résultant de la non-publication de l’Accord du 3 avril, de l’absence des institutions critiques proposées, de l’inaction du Conseil et de l’impact négatif sur le Conseil de son inaction face aux allégations de corruption contre trois de ses membres.
L’une des principales préoccupations exprimées par les deux institutions de gouvernance était les difficultés rencontrées par la police haïtienne et les forces kényanes pour faire face à l’insécurité. Cela reste la première attente du peuple haïtien. La préoccupation commune exprimée était que la force kényane manquait à la fois de personnel et d’équipement et qu’elle n’avait donc pas la capacité de tenir le territoire récupéré. La nécessité de fournir un financement adéquat au MSSM pour résoudre rapidement ces pénuries d’équipement et de personnel a été soulignée, besoins également exigés par la police haïtienne.
Pour sa part, le Premier ministre était parfaitement conscient que la fenêtre d’opportunité ne durerait pas longtemps et que la population du pays attendait des résultats. Il a clairement indiqué que le manque de ressources et l’effondrement des institutions de l’État étaient des obstacles, mais que des efforts étaient en cours pour s’attaquer aux problèmes socioéconomiques et humanitaires critiques qui assaillaient la population. Le Premier ministre a souligné que, si la question de l’insécurité n’est pas résolue, les progrès sur d’autres champs critiques de l’action gouvernementale seront très probablement compromis.
Lors des réunions avec un large éventail de représentants de la société civile et des partis politiques non représentés au TPC et au gouvernement, il y avait l’opinion commune que ce qu’il fallait, c’était une réinitialisation et une reconfiguration du TPC. Les préoccupations et les questions soulevées ont fait l’unanimité : l’incapacité de l’État à améliorer la sécurité ; la déception face au manque d’impact de la présence des forces kenyanes ; l’érosion de la confiance du public dans le TPC, exacerbée par le scandale de corruption et les demandes véhémentes de retrait des trois conseillers ; l’inquiétude croissante qu’en raison de retards, perçus comme de l’inaction, le processus de transition ne respecterait pas l’échéance de février 2026 pour l’élection d’un président élu. Les représentants des partis politiques qui ne sont pas liés au CPT ont dénoncé le caractère non inclusif du Conseil des ministres et les avantages pécuniaires et autres dont les partis politiques représentés au Conseil par l’intermédiaire de leurs ministres désignés étaient susceptibles de bénéficier à l’approche des élections.
Les retards dans la mise en place des institutions essentielles, la nécessité d’une plus grande efficacité pour atteindre les principaux objectifs dans les délais impartis et l’impact corrosif des allégations de corruption ont contribué à la fragilité du processus de transition. Les allégations de corruption n’auraient pas pu arriver à un pire moment et devront être résolues rapidement afin de préserver l’intégrité de l’institution et la confiance du public dans le processus de transition. À cet égard, l’enquête de l’agence d’enquête anti-corruption sera d’une importance cruciale.
Il faut revenir à l’éthique de l’accord du 11 mars 2024 en Jamaïque, qui reposait sur l’inclusion, le consensus et la responsabilité.
20 août 2024
Traduit de l’Anglais au Français