La déclaration du président Macron, qui semble ignorer la grandeur et les souffrances historiques infligées au peuple haïtien, est non seulement réductrice pour lui, en tant que président d’un grand pays, mais aussi profondément eurocentrique et néocolonialiste. Il est impératif de rappeler l’histoire tragique et complexe d’Haïti, une nation qui, après avoir défié l’esclavage et les puissances coloniales, a été soumise à un injuste traitement et à une exploitation continue.
Haïti, première république noire du monde, a payé un prix exorbitant pour sa liberté, après la défaite infligée à l’armée napoléonienne, affrontant non seulement la répression des puissances coloniales, mais aussi un embargo et des indemnités écrasantes imposées par la France en 1825, qui ont plongé le pays dans la pauvreté et la misère.
Les propos de ce Macron doivent être suivis d’une prise de conscience collective. Ces propos doivent être un cri de ralliement pour tous les Haïtiens contre ces oppresseurs de tous les temps.
La France a des comptes à rendre, non seulement à Haïti, mais aussi au monde entier, sur la manière dont elle a traité ses anciennes colonies. L’histoire de l’exploitation et de l’oppression ne peut être balayée sous le tapis. L’approche de l’ambassadeur français parlant de propos malheureux n’est qu’un second affront par sa manière de faire. Il faut une lettre d’excuses publiques. Oui, il en faut plus.
Si l’ambassadeur de France en Haïti ne présente pas d’excuses publiques, cela ne serait pas seulement un acte de mépris ; cela constituerait un affront à la dignité du peuple haïtien. Le Conseil Présidentiel de Transition, CPT, doit agir et, s’il le faut, prendre la voie des grands pays d’Afrique, bottant le cul de ces petits français qui n’ont jamais rien apporté de bons à la terre de Dessalines.
Il est crucial que les représentants de la France reconnaissent leur rôle dans ce qui est aujourd’hui une crise systémique. Les mots de ce Macron là, révèlent une méconnaissance dangereuse des défis auxquels Haïti est confronté, et une attitude qui perpétue la stigmatisation d’un peuple déjà éprouvé.
Nous avons fait preuve d’une résilience incroyable face à des défis incommensurables, qu’il s’agisse des catastrophes naturelles, de la pauvreté endémique ou des crises politiques. Nous sommes un peuple qui a lutté pour sa dignité et son autonomie, transcendant les entraves laissées par un passé colonial. Dire qu’Haïti se détruit lui-même sans reconnaître les influences extérieures est non seulement trompeur, mais cela constitue également une insulte à notre intelligence et à notre capacité à gouverner et à développer Haïti. Laissez-nous en paix, cessez d’alimenter les gangs pour vos propres intérêts et vous verrez notre dimension et nos capacités à nous prendre en mains.
Les paroles de Macron, en décrivant les dirigeants haïtiens comme des « cons », révèlent une arrogance qui rappelle les attitudes colonialistes du passé. Cette vision déformée et péjorative ne fait qu’alimenter les stéréotypes et détourner l’attention des véritables causes des difficultés qu’Haïti traverse. Les dirigeants haïtiens, souvent issus d’un paysage politique complexe et tumultueux, ne peuvent pas être jugés sans considérer le contexte désastreux laissé par des siècles de néocolonialisme. En réalité, la responsabilité de la situation actuelle d’Haïti repose en grande partie sur les politiques internationales, les interventions étrangères et les négligences historiques qui ont empêché le pays de se reconstruire sur des bases solides.
Les déclarations de Macron, stupides et non dignes d’un chef d’état, ne sont qu’une énième manifestation d’une arrogance néocoloniale qui persiste dans le discours français sur Haïti. Reconnaître les dirigeants haïtiens comme des responsables de la déliquescence de leur pays, sans prendre en compte le lourd héritage de l’exploitation et de l’oppression, est non seulement une insulte, mais une tentative de dissimuler la véritable responsabilité historique de la France.
RESTITUER ET RÉPARER !
Il est impératif que la France soit tenue responsable de son passé colonial, et cela passe par la restitution et la réparation de la dette historique envers Haïti. Ce n’est pas seulement une question morale, mais un impératif de justice. Le beau discours de l’ancien président du Conseil Présidentiel de Transition, CPT, M. Edgard Leblanc aux tribunes de l’ONU, bien qu’important, ne suffit pas. Il est temps de passer à l’action concrète. La France doit être traduite devant les tribunaux internationaux pour ses crimes contre l’humanité, pour les souffrances infligées à Haïti, et pour l’énorme dette qu’elle a imposée à ce pays après son indépendance.
La restitution des ressources spoliées et la réparation des injustices historiques ne doivent plus être de simples revendications, mais une exigence incontournable. La France doit enfin reconnaître ses erreurs, faire amende honorable et contribuer à la reconstruction d’Haïti, non pas avec des discours condescendants, mais avec des actions significatives qui témoignent d’un véritable respect pour la dignité et l’autonomie du peuple haïtien. Ce n’est qu’à ce prix que l’on pourra envisager une relation juste et équitable entre les deux nations.
Les discours néocoloniaux n’ont pas leur place dans le dialogue moderne. Il est temps de construire des relations fondées sur le respect mutuel, la réconciliation et la reconnaissance de nos valeurs et de notre grandeur en tant que peuple digne.
Haïti mérite une voix qui porte son histoire, pas une voix qui la minimise.
Haïti mérite d’être soutenu dans ses luttes, non pas avec des discours condescendants, mais avec une véritable solidarité qui respecte son autonomie. La communauté internationale doit entendre la voix d’Haïti, reconnaître ses droits et sa dignité, et surtout, apprendre des leçons du passé pour ne pas répéter les erreurs qui ont conduit à sa souffrance actuelle. Ce n’est qu’ainsi que l’on pourra espérer un avenir où Haïti pourra s’épanouir pleinement, libre de l’ombre du colonialisme et de la négligence.
Jean Marie Plantin
23 novembre 2024
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