Alors que Port-au-Prince est paralysée par une insécurité sans précédent et que les vols commerciaux vers la capitale sont toujours suspendus, le Ministre des Affaires Étrangères, Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste, a entamé un voyage de 15 jours vers Washington et Tokyo. Pour rejoindre le Cap-Haïtien, d’où il a pris l’avion, le ministre a dû recourir à un hélicoptère, illustrant à quel point la situation sécuritaire bloque même les déplacements officiels à l’intérieur du pays.
“Le Ministre des Affaires Étrangères et des Cultes, Son Excellence Monsieur Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste, a quitté le pays ce lundi 2 décembre 2024 pour Washington, conformément aux instructions du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), sous la direction du Président Leslie Voltaire et du Premier Ministre Alix Didier Fils-Aimé.”
Des priorités en décalage avec la crise
Ce voyage, officiellement destiné à aborder la sécurité en Haïti avec les responsables américains et à défendre le renouvellement des lois HELP et HOPE (essentielles pour préserver 30 000 emplois dans le secteur textile), intervient alors que :
• Port-au-Prince reste dominée par les gangs, contrôlant plus de 80 % de la ville.
• La crise alimentaire et sécuritaire atteint des sommets, avec des millions de personnes en situation d’urgence humanitaire.
• Les tensions diplomatiques s’intensifient : Emmanuel Macron a publiquement qualifié les dirigeants haïtiens de “cons”, tandis que la République dominicaine expulse des milliers d’Haïtiens chaque semaine.
. L’incertitude plane sur le statut migratoire des centaines de milliers d’haïtiens aux États-Unis d’Amérique.
Un voyage symbolique ou stratégique ?
La participation du ministre à la réunion Japon/CARICOM à Tokyo, bien que symboliquement importante pour renforcer la coopération internationale, est perçue par beaucoup comme une distraction face aux urgences nationales.
“Pourquoi partir alors que les avions ne peuvent même pas atterrir à Port-au-Prince ?” s’interrogent certains observateurs. La nécessité de passer par le Cap-Haïtien illustre l’ampleur du désordre qui règne dans le pays.
Une image fragilisée par les scandales
Ce déplacement intervient dans un contexte où le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) est fragilisé par des scandales de corruption, une gestion critiquée de la crise, et une défiance croissante de la population. Les déplacements à l’étranger, aussi stratégiques soient-ils, risquent d’amplifier l’impression d’un gouvernement déconnecté des réalités de sa population.
Recentrer les priorités
Face à l’effondrement des institutions et au chaos sécuritaire, beaucoup estiment que l’urgence est à une mobilisation internationale directe pour rétablir la sécurité, assurer l’aide humanitaire et restaurer la confiance de la population dans ses dirigeants. Ce voyage, bien que justifié sur le papier, ne répond pas à l’urgence criante que traverse Haïti aujourd’hui.
