Bien souvent, on entend cette petite phrase « rien n’a changé », lorsqu’on se réfère à la situation du pays. Cependant, tout a changé en Haïti. Pour l’édification de tous, citons quelques faits : Un dirigeant de l’Etat s’est vu refuser un arrêt en République dominicaine et a été refoulé, sans crier gare, sur Porto Rico et, comme l’oiseau de Noé, il n’est plus revenu dans la barque dont il était pourtant le mauvais capitaine et dès lors, il est perdu dans la nature.
Ensuite, nous avons un Exécutif à dix têtes (9 CP, un PM) ; aujourd’hui, les bandits légaux et aussi bien les illégaux sont les égaux des hommes et femmes au pouvoir ; la Constitution devient l’affaire d’un petit groupe d’hommes politiques avides d’argent et dépourvus d’éthique et qui, marchant sur les droits humains, le civisme, le patriotisme, le nationalisme, sont prêts à vendre le pays.
Ces « marchands de pays » n’ont aucun souci de renouveler le système en favorisant une bonne Conférence Nationale ; les kidnappings, les spoliations, les meurtres, les vols, la destruction des hôpitaux privés, semi-privés et publics, la fermeture des écoles, la destruction des édifices publics comme la bibliothèque nationale, la prolifération de groupes criminels, la profanation des lieux de culte, le non-respect de la vie, le trafic d’organes et des humains… pour ne citer que cela, sont monnaie courante.
En 2010, un tremblement de terre, un désastre naturel, a complètement défait le paysage et l’image de la capitale. Près de 300,000 individus dont des familles entières, ont perdu la vie, selon certaines statistiques. Beaucoup de survivants sont déplacés et vivent comme des « déclassés » car, ne pouvant plus joindre les deux bouts financièrement et ainsi incapables de remonter la pente, ils sont obligés de faire contre mauvaise fortune bon cœur et de se réfugier pour la plupart dans des abris de fortune ; leurs demeures, jusqu’ici, ne seront jamais remplacées malgré les promesses des dirigeants.
Depuis lors le phénomène des gangs prend de l’ampleur, surtout avec l’arrivée des bandits légaux au pouvoir qui les côtoient et les utilisent ; c’est une autre calamité plus terrible qui contribue à augmenter le nombre de déplacés. Un rapport publié par les Nations Unies le 14 Janvier 2025, fait état d’un million de gens qui ont fui leurs maisons pour prendre abri dans des sites temporaires dénués en général d‘eau potable, de services de santé. Les gangs, selon les Nations Unies, sont responsables de la mort de plus de 5.600 personnes l’année dernière, soit en 2024.Toujours selon ce rapport, plus de 2.200 blessés et près de 1.500 enlèvements ont été enregistrés au cours de l’année 2024.
En 2023, un ministre du gouvernement de Ariel Henry constatait, comme nous, de simples civils, acceptait et relatait que les gangs agissant dans certaines zones, avaient fait de ces dernières des « zones perdues ».
Si nous disons que rien n’a changé, nous nous « mettons le doigt dans l’œil », nous sommes dans le déni et nous avons besoin d’un psychanalyste. Le 19 Janvier 1995, deux femmes pédiatres ont été kidnappées à hauteur de Eagle Market près de Delmas 60 et ont été conduites à Ti Tanyen pour y être exécutées. L’une ayant reçu trois balles, fut trainée à travers des tessons de bouteilles, des épines et des ronces, et enfin jetée dans une fosse parce que les agresseurs pensaient l’avoir tuée ; pourtant, elle a quand même survécu ; malheureusement, l’autre, n’ayant été touchée que par une balle, a rendu l’âme à Ti Tanyen. Pourquoi cette fatalité ? Pour toute réponse, nous nous appuyons sur le passage de l’écriture sainte qui nous affirme « alors, de deux hommes qui seront dans un champ, l’un sera pris et l’autre laissé ».
En effet, « l’homme élabore de nombreux plans, mais seule la décision du Seigneur se réalise ». Moi, qui suis sortie vivante, je sais qu’en cette nuit « de la détresse, j’ai invoqué l’Eternel et II a entendu mes cris, Il s’est souvenu de mes prières, de mes adorations ; Il m’a protégée, m’a délivrée de mes frayeurs, Il a fait sortir mes pieds des filets et m’a mise au large. » J’ai demandé la vie et il me l’a donnée. Mon cœur s’est raffermi, car ceux qui essaient en vain de vous tuer, vous rendent plus forts. Subséquemment, des blessures douloureuses peuvent nous guérir de la méchanceté et les coups les plus durs nous assagir. Je parle d’expérience.
Bref, tout cela pour vous exhorter et vous demander, mes chers sœurs et frères, citoyennes et citoyens d’Haïti, de vous fortifier, d’espérer, de ne pas baisser les bras. Ne passez pas votre temps dans la torpeur, à dormir sinon les méchants auront gain de cause.
Levons-nous et battons-nous pour la justice car l’application du droit fait la joie des gens de bien, mais frappe d’affolement le malfaiteur. Il faut inlassablement nous battre pour rétablir la sécurité et les services publics, car le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité d’une personne, le droit au respect de la vie, le droit à la liberté d’expression, par exemple, nous sont dus.
Ainsi, ne nous décourageons pas. Rappelons-nous que les gens dissimulés, malfaisants et faux, les hommes de sang dont les mains sont criminelles, qui ont pris le pays en otage ne dureront pas. , Ceux qui s’appuient sur l’argent acquis en exploitant la classe défavorisée ou volé à l’Etat et que les contribuables ont gracieusement fourni à ce dernier, ceux qui comptent sur leurs fusils et mitraillettes de guerre pour décimer le peuple sans défense et poursuivent la population d’une haine violente, les méchants et les scélérats qui conçoivent les mauvais desseins, seront tous rendus impuissants, réduits à la poussière de la mort. De plus, quand les dirigeants ferment les yeux sur ce qui se passe dans le camp des terroristes et bouchent les oreilles aux cris des malheureux, ils doivent s’attendre à être à leur tour ignorés et leurs cris non entendus quand ils les pousseront.
Peuple haïtien, du courage ! Je me suis battue pour rester en vie et me voici 30 ans après, bien vivante et plus forte. Oui, tout a changé dans le pays, alors nous aussi, les femmes et les hommes, surtout cette majorité silencieuse, changeons et armons -nous de détermination pour continuer le changement, mais dans la bonne direction. Au travail et bloquons la descente aux enfers ; prenons le chemin de la justice qui élèvera notre Nation. En route, pour une « nouvelle Haïti chérie ».
Pour la « cause de notre pays et la nôtre, ne nous taisons pas et pour les générations futures, n’ayons de cesse que la justice paraisse dans la clarté et la délivrance d’Haïti comme une torche qui brûle. »
A bas les gangs et les producteurs de gangs !
Winie Edugène Robin
Conférence Nationale : Sauver Haïti
19 janvier 2025