Insertion demandée
Décret du 10 Avril 2024 : Un imbroglio qui dénote une opposition frontale et diamétrale entre le Conseil Présidentiel de Transition et le Gouvernement Ariel Henry
Le Premier Ministre Ariel Henry faisant fi de la Constitution haïtienne s’est conduit en véritable autocrate en publiant au journal officiel de la République d’Haïti « Le Moniteur » un décret créant un Conseil présidentiel comme nouvelle approche gouvernementale. Il laisse pourrir la situation au lieu de remettre le pouvoir, détenu illégalement depuis 33 mois, à la Cour de Cassation de la République gardienne de l’État de Droit et dernier pilier détenteur de la souveraineté confiée par le peuple haïtien, conformément aux dispositions de l’article 59 et suivants de la Constitution comme nous l’avons suggéré et documenté.
Par ce décret, Monsieur Ariel Henry met sous son contrôle cette créature afin d’avoir non pas une transition ordonnée mais un « départ bien ordonné ». Aujourd’hui, ils (les représentants) se trouvent assujettis à l’autorité directe du Conseil des ministres du Gouvernement Henry.
Un imbroglio qui dénote une opposition frontale et diamétrale entre le Conseil présidentiel de transition (CPT) et le Gouvernement Ariel Henry dans leur démarche.
Œuvre législative faisant autorité, ce décret du 10 Avril 2024 publié au journal officiel « Le Moniteur » # spécial 14 du 12 Avril 2024 s’impose Erga Omnes à tous et à toutes et ne peut être rejeté par quiconque même si les droits de protester sont toujours réservés aux citoyens. Conséquemment, il ne pourra être abrogé que par l’autorité qui l’a publié. Tout artifice pour le contrecarrer ou le contrer peut entraîner des conséquences graves pour les contrevenants incluant leur mise hors-la-loi. La seule voie qui s’ouvre à ceux-là qui veulent manifester leur mécontentement est la protestation dans les normes ou la négociation directe ou indirecte.
Les failles du décret
Ce décret établit un conseil présidentiel sans indiquer les modalités de son entrée en fonction et l’assujettit à l’approbation du Conseil des ministres qui est chargé de mener la procédure devant aboutir à la nomination, la publication et l’installation de ses membres, lesquels sont pour l’instant appointés par ce décret à faire état de leurs capacité et qualité à en faire partie.
Bientôt, n’en verra-t-on pas quelques-uns mutilés soit en vertu de l’article 135 de la constitution ou par l’application que le conseil des ministres aura faite de l’article 2 dudit décret ? Ou mieux encore, ne vont-ils pas se démettre en réaction à l’article 3 qui donne au Conseil des ministres la tâche de régler leur mode d’organisation et de fonctionnement ?
Attendre l’acte réglementant le CP
La Nation devra encore patienter avant de songer à l’entrée en fonction dudit CPT puisqu’il faudra attendre un acte réglementaire du gouvernement Ariel Henry.
Il faut noter que ce gouvernement n’a pas encore évoqué l’idée de la création d’une commission indépendante pour faire le vetting des membres du CPT. A se demander s’il ne s’est avisé de le faire lui-même. A quel moment procédera-t-on à l’installation de ce conseil ? De toute façon, elle se fera avant la nomination du PM – cela répond même au gros bon sens et ne souffre pas de confusion. Le nouveau PM qui tiendra ses pouvoirs du Conseil Présidentiel ne pourra pas être fonctionnel avant que ce dernier ne soit lui-même effectif.
Une approche inédite
La trame de cette tranche d’histoire peut être conçue comme une approche inédite par laquelle l’Etat Haïtien se subordonne lui-même, sans détours, à la puissance des institutions internationales et des partenaires internationaux. Contrairement aux esquives de l’Accord signé par les entités constitutives du CPT et à leur proposition de décret, l’article 5 ne laisse aucune porte de sortie pour éviter le déploiement des forces étrangères.
Parallèlement, ce même article évoque la participation du CPT à la formation d’un cabinet ministériel dont l’article 7 confie le choix des membres au nouveau Premier Ministre avec l’accord du CPT. Il est clair que le rôle de ce PM demeure prépondérant par rapport à la prétendue toute puissance voulue et recherchée par les membres du CPT tel que consigné dans l’Accord entre ses membres. Par ailleurs, pour bien appliquer l’article 12, serait-il impossible de voir PM Henry présider à l’installation de cette structure ?
Une population qui gémit
Entre temps, la population gémît au purgatoire des urgences de son quotidien. Les écoles et les hôpitaux se ferment, ceux qui ont besoin de dialyses se meurent, la faim ronge la population, les prix sont en hausse vertigineuse, les activités s’estompent dans un pays en péril qui ne dit plus son nom… mais on dirait qu’en Maître du jeu, le PM Henry détient encore les meilleures cartes tandis que son Conseil des ministres se hâte lentement sans soulager les douleurs du peuple haïtien.
Se fera-t-on complices de cette apocalypse ? Va-t-on tous assister impuissants à l’extinction de notre peuple? Fera-t-on ce grand désaveu aux prouesses de ceux qui se sont battus pour nous léguer une patrie? L’heure est extrêmement grave et nous invite tous à la RÉFLEXION-ACTION pour le sauvetage national qui ne peut plus attendre.
Ayisyen, Ayisyèn tout bon yo, kote nou ? Peyi a pa kapab ankò !
Fait le 14 Avril 2024
Me Camille Leblanc, Avocat du Barreau de Port-au-Prince
Ancien Ministre de la Justice et de la Sécurité Publique
Représentant du Regroupement de Citoyens Engagés
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