Le 21 septembre 2023, les « Affaires Mondiales Canada » ont informé que Carl F. Braun, l’un des fondateurs de la UNIBANK, a été sanctionné sur recommandation de la Ministre des Affaires Etrangères, Mélanie Joly. Le Président du Conseil d’Administration de la Unibank a été sanctionné par le Canada en vertu du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant Haïti en réponse à des actes de corruption importants qui alimentent la crise sécuritaire, politique et humanitaire qui sévit actuellement dans le pays.
Braun a été ciblé par l’équipe du PM Justin Trudeau comme un des membres des élites économiques qui supportent ou qui financent les gangs armés en Haïti. Il est actuellement interdit de territoire au Canada en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et fait l’objet d’une interdiction générale de transaction.
Depuis le 03 novembre 2022, le Canada a décidé de ne pas attendre les sanctions des Nations Unies pour sanctionner des personnalités politiques et économiques d’Haiti, tout en s’inspirant de la résolution de l’ONU 2653 (2022) du 21 octobre 2022 établissant un régime de sanctions en Haïti. Aucun dossier n’a été remis à la justice haïtienne, aucune preuve n’a été acheminée. La demande du dossier incriminant les sanctionnés est demeurée jusqu’à présent sans réponse, selon les déclarations de la ministre haïtienne de la justice Emmelie Prophète.
Plusieurs personnalités haïtiennes sanctionnées depuis l’année dernière par le Canada attendent, en vain, une réponse du bureau de Mélanie Joly les concernant, alors que ces mêmes règlements canadiens prévoient un délai d’un mois à compter de la date de la correspondance pour recevoir une réponse du ministère des Affaires étrangères. Des organisations de droits humains reconnues par le Haut-Commissariat des Droits de l’homme des Nations Unies ont dénoncé cette façon de faire qui constitue une violation flagrante des droits humains des personnalités sanctionnées.
Braun aura t-il plus de chance que les autres, étant donné que la banque Canadienne Scotiabank a réalisé une fusion de sa branche haïtienne en faveur de la UNIBANK lors pilotée par son Président Carl Braun en 2017? La UNIBANK avait, en effet, acheté les opérations en Haïti de la Scotiabank. Rappelons que de telles opérations ne peuvent se réaliser sans un vetting en règle des membres du Conseil d’Administration intéressé. On se demande alors en quelle année Carl Braun est-il devenu pour le Canada un grand corrupteur, un membre de l’élite économique qui finance les gangs ?
Les actionnaires de la UNIBANK pourraient-ils se trouver indirectement mêler dans ce dossier de sanctions ? Tenant compte de l’effet « escalier » que certaines banques avaient déjà appliqué dans les premiers moments à certains sanctionnés.
Pour mener son combat juridique Carl Braun a donc décidé de démissionner afin de permettre à la Unibank de poursuivre son chemin. » Pour bien mener ce combat – qui nécessite du temps et du recul – et aussi pour faciliter la position de la UNIBANK par rapport à son régulateur et à ses banques correspondantes, j’ai donc pris la décision de soumettre ma démission comme membre du Conseil d’Administration de la UNIBANK et de toutes ses filiales, ainsi que de la Fondation UNIBANK. » Souligne-t-il dans la lettre adressée à ses collaborateurs.
Tout comme la Sogebank, les sanctions canadiennes fragilisent la Unibank, le groupe GFN, ses filiales, entreprises-soeurs et partenaires. Les sanctions canadiennes fragilisent le système financier d’Haïti en général, notamment les banques qui sont également actionnaires dans plusieurs autres entreprises faisant bouger l’économie nationale. Ici, on ne saurait oublier la lettre ouverte de l’ambassadeur du Canada lors Sebastien Carrière qui, en fin de mission a avoué que les sanctions, sont une arme pour obliger les élites à s’aligner et se mettre sur la table du Dialogue, car on ne sait jamais qui sera le prochain sanctionné. « Les sanctions ne sont pas politiques » avait-il ajouté.
« Les sanctions ont créé un climat de pression directe sur les membres de l’élite pour qu’ils aident à la résolution de la crise – car il existe toujours une possibilité que des sanctions supplémentaires soient imposées. Les sanctions ont eu un impact immédiat puisque les derniers mois ont vu un engagement concret de l’élite économique dans le dialogue politique, une réduction marquée des manifestations violentes et des peyi lòk, et une augmentation substantielle des recettes douanières.« dixit Sebastien Carrière.
Le système bancaire haïtien n’a malheureusement pas protégé les droits de ses clients dès les premières vagues des sanctions du Canada. Après les sanctions de Sheriff Abdallah pour la Sogebank, Reynold Deeb pour la BUH, aujourd’hui Carl Braun pour la UNIBANK, on ne s’est plus à quoi s’attendre du PM Canadien Justin Trudeau, actuellement en pleine campagne électorale.
Malheureusement, la Banque de la République d’Haïti (BRH) avait laissé les avocats des banques se débrouiller seuls avec l’interprétation de la loi canadienne et ses règlements. Même les comptes en gourdes, n’ayant rien à voir avec les banques correspondantes, ont été fermés pour répondre au voeu du Canada et des correspondants. S’agissait-il d’empressement ou d’excès de zèle, quand la justice haïtienne n’a jamais été saisie du dossier des sanctions canadiennes.
La Ministre de la Justice ad intérim Emmelie Prophète avait promis d’écrire au Canada pour solliciter le dossier, mais aucune suite n’a été donnée. Un silence amère règne dans cette affaire d’état où les preuves sont classifiées, si elles existent.
Ayant eu une peur bleue des conséquences des partenaires internationaux, la Banque de la République d’Haïti et l’Association Professionnelle de Banque (APB) n’ont pas su anticiper les sanctions à venir d’autant que les premières sanctions visaient les hommes politiques en priorité. Ces hommes politiques à qui il est attribué l’exclusivité de la crise actuelle qui sévît dans le pays !
A cela, pour se dédouaner, une circulaire de la BRH portant sur le statut de PPE (Personnalité Politiquement Exposée) a été rediffusée par certaines banques pour fermer les comptes des sanctionnés, des membres de leur famille et partenaires. Jean Baden Dubois, ancien Gouverneur de la BRH avait même déclaré dans une entrevue sur Télé Métropole, qu’il comprenait la prudence des banques haïtiennes qui ont usé de leur droit de fermer un compte bancaire de n’importe quel client pour des raisons diverses.
Les sanctions sont bien plus que la fermeture d’un compte en banque en Haïti ou la révocation de ses cartes de crédit, a confié un sanctionné. Au fur et à mesure que les jours passent, l’étau se resserre autour des sanctionnés du Canada qui deviennent des exclus du système financier mondial, des marginalisés de la société, des pestiférées pour certaines entreprises commerciales et des morts-civils ce, du jour au lendemain. La vie sociale n’a plus aucune importance sinon pour le noyau qui connait sa vraie nature, a t’il ajouté.
Si le Canada ne présente pas les preuves suffisantes, ce pays dit “Etat de Droit” pourra t’il réparer les dégâts matériels, moraux, émotionnels et psychologiques causés aux personnalités sanctionnées? On peut se demander perplexe: pourquoi le Canada n’a-t-il pas voulu attendre les sanctions onusiennes?
Ce combat que mène aujourd’hui Carl Braun et d’autres sanctionnés de la classe économique est le résultat du refus des élites et des organisations haïtiennes de droits humains de dire NON à l’inacceptable. Cette manière pour le Canada d’imposer ses décisions arbitraires au pays aurait dû être dénoncée très tôt. Mais l’élite haïtienne a cette incapacité d’exiger que les principes juridiques et démocratiques soient respectés. Les droits humains doivent être les mêmes pour tous et les grandes puissances économiques y sont aussi assujetties.
C’est peut-être finalement la plus grande leçon que le Canada est en train de donner à la classe économique d’Haïti à travers ses sanctions qui n’en finissent pas. Il est peut-être temps que l’élite économique prenne en main ses responsabilités pour mettre le pays sur les rails de la modernité et du développement; conditions sine qua non pour se faire respecter par les autres pays et garantir les générations futures.
UNIBANK S.A. est une société anonyme de banque commerciale d’Haïti, la propriété de 413 investisseurs privés haïtiens. Elle exerce principalement ses activités dans les segments de marché suivants : services bancaires aux particuliers, petites, moyennes et grandes entreprises; services de banque d’affaires; transferts transfrontaliers; micro-crédit rural et urbain; et assurances. Elle est la plus grande banque d’Haïti. en 2016, elle est classée parmi les 25 plus grandes banques du CARICOM en termes d’actifs et de capitaux propres (classement établi par le Financial Times). UNIBANK et son groupe de sociétés offrent des services financiers à environ 1,300,000 clients en Haïti et et à l’étranger. Elle a été fondée le 20 novembre 1992, a reçu sa licence de banque le 18 janvier 1993, et a inauguré ses opérations au public le 19 juillet 1993.
Source : site Unibank, Le Nouvelliste, Reuters, Le Témoin Haiti, Affaires Mondiales Canada, Hedbo24
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