Les relations entre Haïti et la République dominicaine semblent se détériorer à mesure que les tensions diplomatiques s’accumulent. La récente suspension des services de légalisation de documents par la République dominicaine et l’absence de dialogue entre les chanceliers des deux pays soulèvent de nombreuses interrogations.
Un climat de tension grandissant
Selon nos sources, lors de la dernière session de l’Organisation des États Américains (OEA), le chancelier haïtien Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste aurait refusé de rencontrer son homologue dominicain, Roberto Álvarez, le 10 mars 2025 dernier. Ce désistement de dernière minute serait dû à une divergence sur l’organisation de la rencontre pour des raisons spécieuses voire très superficielles selon des témoins.
Cette absence de communication entre les chefs de la diplomatie des deux pays intervient dans un contexte déjà marqué par des décisions unilatérales de la République dominicaine à l’égard d’Haïti.
Suspension des services consulaires : un signe de rupture ?
Le 25 mars 2025, le ministère des Relations extérieures de la République dominicaine a annoncé la suspension temporaire des services de notifications judiciaires dans ses consulats en Haïti et au Venezuela. Selon le communiqué officiel, cette décision est motivée par la montée de l’insécurité en Haïti.
Si cette justification met en avant des raisons sécuritaires, d’aucuns s’interrogent sur la réelle motivation derrière cette annonce. S’agit-il d’un pas de plus vers une rupture des relations diplomatiques entre les deux pays ?
Les conséquences pour les citoyens haïtiens
La détérioration des relations bilatérales impacte davantage les Haïtiens, notamment ceux qui dépendent des services consulaires dominicains pour leurs démarches administratives et légales. Cette décision rappelle la crise précédente, lorsque la rencontre mal tournée entre le Premier ministre haïtien Garry Conille et le président dominicain Luis Abinader avait conduit à l’intensification des expulsions de migrants haïtiens, atteignant un rythme de 10 000 rapatriements par semaine.
Avec la fermeture de la section visa du consulat dominicain à Pétion-Ville depuis 2023 et la suspension actuelle des services de légalisation, il devient de plus en plus difficile pour les Haïtiens de bénéficier d’un encadrement administratif dans leurs relations avec la République dominicaine. Qu’il s’agisse de légaliser un acte de naissance, un acte de divorce, des relevés de note, un acte de mariage, un mandat ou autres documents dont la signature du consulat dominicain en Haïti est requise, les ressortissants haïtiens devront attendre la fin de la crise sécuritaire si le motif avancé est le vrai. (Voir note de clarification de l’Ambassade dominicaine en Haïti qui précise que les légalisations et authentifications de documents se poursuivent).
Haïti silencieuse face aux décisions dominicaines ?
Face à cette situation, les autorités haïtiennes semblent adopter une posture passive. Toujours et encore la loi du silence. En dépit de l’envoi de Fritz Longchamps comme nouvel ambassadeur d’Haïti en République dominicaine, aucune initiative diplomatique significative ne semble avoir été mise en place pour renouer le dialogue avec le voisin dominicain.
Fritz Longchamps a-t-il été mal préparé pour sa mission plus stratégique et plus étoffée que toutes les autres, ou se heurte-t-il à une intransigeance dominicaine ? Pourquoi l’administration haïtienne tarde-t-elle à établir un véritable canal de communication avec les autorités dominicaines ?
Les services d’intelligence dominicains en savent-ils plus que ce qui est officiellement annoncé ? La situation en Haïti est-elle perçue comme une menace suffisante pour justifier ces décisions ?
Alors que l’incertitude plane sur l’avenir des relations entre les deux pays, une chose est claire : il est urgent que les autorités haïtiennes prennent des mesures pour rétablir un dialogue constructif et éviter une crise diplomatique aux conséquences imprévisibles pour les plus de sept cent mille haïtiens en situation migratoire peu envieuse en République Dominicaine.
La Diplomatie Haïtienne doit prioritairement se mettre au service des Haïtiens. Elle ne peut pas être un tremplin pour de vaines querelles de chapelle ni pour exhiber l’hypertrophie de l’égo de quiconque. La prise en charge passe par un climat de sécurité pour tous et la détermination d’imposer le respect de l’Haitien partout où il puisse être.
Haïti d’abord, Haïti toujours.
La rédaction (Publié le 25 mars 2025)
Note de rectification de l’Ambassade Dominicaine en Haiti
: Dans une correspondance adressée le 28 mars à notre rédaction, l’ambassadeur dominicain en Haïti, son Excellence Faruk Miguel, a tenu à porter les clarifications suivantes :
Première clarification : “Nous tenons à préciser qu’il n’y a pas de conflit entre les ministres des Affaires Étrangères des deux pays, mais plutôt un dialogue fluide et harmonieux au profit des relations bilatérales. Pour preuve, le 10 mars, les deux ministres des Affaires Étrangères se sont rencontrés à l’Assemblée Générale de l’OEA, tenue à l’occasion de l’élection du nouveau secrétaire général de l’entité, et ont eu un échange cordial.”
Deuxième clarification : Le 24 de ce mois, le ministère des Affaires Étrangères de la République Dominicaine a publié la déclaration suivante : « Compte tenu de la situation d’insécurité croissante en Haïti et de la suspension des relations diplomatiques entre la République Dominicaine et le Venezuela, le Ministère des Affaires Étrangères informe que le service de notification judiciaire dans ces pays, par l’intermédiaire de nos consulats, est temporairement suspendu.»……..
Nous informons également que les consulats de la République Dominicaine en Haïti continuent d’offrir des services de légalisation de documents tels que, actes de naissance, actes de mariage, certificats d’études, certificats de bonne conduite, ainsi que la délivrance de lettres de route, pouvoirs de représentation consulaire, entre autres. Les seuls services temporairement suspendus dans nos consulats en Haïti sont les notifications judiciaires et la délivrance de visas.
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